Soulevons-nous - Journal collectif d’une lutte ouvrière (et pas que) 9/16
La manifestation de novembre 2021 des ex-GKN se prépare : suite de notre feuilleton

Journal
24 octobre
Morts au travail, salaires de misère, inflation galopante, retour en force de la loi Fornero sur les retraites (mais avait-elle jamais disparu ?), crises d’entreprises, mesures nécessaires contre les délocalisations, décennies de coupes budgétaires de la santé publique, une gestion de la pandémie qui met sur le dos du droit du travail ses propres aberrations, un gouvernement ovationné par la Confindustria, les manifestations très suivies de la lutte pour la justice climatique, le scandale Alitalia, le retrait de Stellantis : si ce n’est pas maintenant, alors quand ? Si ce n’est pas maintenant, quand la grève générale sera-t-elle légitimement la seule solution à tous les enjeux sociaux ?
Mais la grève générale, ce n’est pas un tract. Ce n’est pas un ordre du jour. Ce n’est pas un groupe d’acronymes. Ce n’est pas un raisonnement, aussi rationnel et complexe soit-il. Ce n’est pas un mantra à répéter. C’est aussi cela. Mais c’est surtout un état d’effervescence sociale croissante, comme un ciel nuageux qui va bientôt se décharger de toute son électricité. C’est un sentiment de communauté, d’appartenance, ce sont des écoles en ébullition et un désir d’insoumission, c’est la consommation d’électricité qui baisse parce que ce jour-là tout est à l’arrêt. C’est la société qui tombe dans le silence des machines immobiles et des bureaux vides. C’est un silence dans lequel les pensées des travailleuses et travailleurs deviennent volonté et se font entendre dans toute la société. C’est ça, une grève générale et généralisée. C’est pourquoi nous vous disons : si ce n’est pas maintenant, alors quand ? Mais nous ajoutons : si ce n’est pas vous, alors qui ? Si ce n’est pas nous tous, alors qui ?
27 octobre
Il y a les acteurs et il y a le théâtre. Dans notre lutte, nous avons souvent l’impression d’avoir à faire à des acteurs. Et de surcroît, à de mauvais acteurs. Ils nous montrent des slides avec des données génériques, ils récitent leur texte, ils suivent le scénario écrit par leur patron. Et ils se préparent à un nouveau tour de passe-passe : cette fois-ci, c’est le public qu’ils essaient de duper avec l’arrivée d’un conseiller, comme annoncé dans le Nazione d’aujourd’hui.
Puis il y a le théâtre. Un espace public de discussion, de rassemblement. Demain soir au Teatro Puccini de Florence, à 20 h 30, nous essayerons, avec vous tous, d’être une intelligence collective. Et il nous semble qu’un théâtre est le cadre le plus approprié pour cela. Enfin, il y a le théâtre en tant qu’art. Avec ses compagnies, ses collectifs, ses techniciens, ses ouvriers, ceux qui écrivent, ceux qui jouent, ceux qui travaillent à d’autres niveaux. Un lien plein d’empathie s’est créé entre notre lutte et le monde du théâtre. Peut-être parce que la résistance, le changement et la lutte demandent avant tout des efforts artistiques et créatifs.
Ainsi, hier soir, par exemple, nous étions une centaine à assister à la première florentine de « Storie » de Stefano Massini au Teatro la Pergola. À un moment de la pièce, Stefano fait référence à notre lutte. Mais au-delà de cela, ce fut pour nous un moment de retrouvailles, de proximité collective avec ceux qui sont proches de nous depuis le début à travers leur art. Nous nous sommes laissés bercer et nourrir d’émotions. Car la première condition pour continuer à se battre est de ne jamais se laisser gagner par le cynisme ou le vide.
Autre exemple, nous avons reçu la compagnie Kepler-452 pendant plusieurs jours. Ils étaient là pour nous parler, apprendre à nous connaître, discuter du spectacle qu’ils préparaient. Pour nous, ce sont des agents de la Digos envoyés incognito afin d’en apprendre sur les luttes sociales. Mais évidemment ils ont bien appris leur métier et sont tombés si amoureux de la beauté de ce qu’ils faisaient qu’ils ont oublié ceux qui les avaient envoyés en mission. Nous plaisantons, bien sûr. Mais cela pourrait être une histoire vraie.
Et surtout, beaucoup de compagnies théâtrales nous ont demandé de venir présenter à l’occupation des spectacles sur le monde du travail. Nous nous en réjouissons. Mais le moment est peut-être venu de remettre le théâtre au centre. Que notre visibilité puisse servir à des lieux et des mondes fortement touchés par la pandémie (ou plutôt par la gestion de la pandémie).
C’est pourquoi nous souhaitons lancer la tournée Soulevons-nous dans les théâtres de la région, en remettant aux clubs et aux théâtres toutes les propositions de spectacles que nous avons reçues à l’occupation. Usines ouvertes et théâtres remplis !
29 octobre
Nous faisons le point à la veille de la manifestation de demain :
112 jours d’assemblée permanente. 500 personnes à Puccini. 12 bus partent pour le cortège du 30 à Rome. La famille s’agrandit toujours plus, on se serre toujours plus les coudes, l’adrénaline monte et redescend, et la conscience, elle, ne fait que s’accroître. Il y a ceux qui ont abandonné parce qu’ils ne pouvaient pas vivre ainsi, dans la lutte. Il y a ceux qui ont décidé qu’ils ne pouvaient pas vivre une vie pareille et qui, par conséquent, n’abandonneront jamais. GKN reste inclusive, protectrice, solidaire, communautaire. Pour nous, le problème n’est pas de savoir qui participe, que ce soit d’une association, un centre social ou un prêtre de banlieue. Pour nous, le problème est de savoir qui ne participe pas.
Quelques précisions : nous pouvons reprendre le travail à tout moment, ne relancez pas les procédures de licenciement, votez la loi anti-délocalisation, GKN se vend si la continuité de sa production est assurée, d’abord on discute du plan de continuité de l’emploi et ensuite des indemnisations, les indemnisations ne peuvent pas ne rien coûter à l’entreprise, nous ne nous laisserons pas mijoter à petit feu, la réindustrialisation radicale et totale ne peut se faire qu’avec la nationalisation, la nationalisation doit se faire sous le contrôle de l’assemblée permanente.
Ne vous laissez pas piéger par des messages rassurants. Restez soudés, soyez notre intelligence collective : GKN appartient au territoire qui la défend.
Usines ouvertes, salles et théâtres remplis ! Lançons maintenant la tournée Soulevons-nous dans les salles et les théâtres locaux. Rendons la solidarité que nous avons reçue aux lieux et secteurs particulièrement touchés par la pandémie et les logiques du système.
La grève générale s’impose chaque jour davantage. Appelons encore plus fort à la grève générale, préparons-nous à la faire, généralisons-la. À la fin de la manifestation du 18 septembre, nous étions là à crier « grève générale, si ce n’est pas maintenant, alors quand ? ». Le 11 octobre, lorsque nous sommes descendus dans la rue avec les syndicats de base, c’était une étape vers la grève générale. Cela ressemble à de la science-fiction, pourtant les faits sont là : la reprise économique fondée sur la précarité, un gouvernement avec lequel il n’y a pas de négociation possible, le retour définitif de la loi Fornero, trois morts au travail par jour, la vie chère, les bas salaires, l’argent des PNRR qui coule à flots et est distribué gracieusement aux entreprises qui est perçu comme un affront, les événements climatiques extrêmement critiques, les coupes budgétaires de la santé, la gestion de la pandémie qui divise et qui n’est pas à la hauteur... La pression augmente et la mobilisation s’installe : la FIOM demande un forfait de huit heures de grève, les syndicats universitaires de Florence nous ont apporté hier un ordre du jour approuvé par l’assemblée universitaire de Florence qui commence par : « la coupe est pleine ». Mais la grève générale n’est pas encore lancée. Il faut se battre pour qu’elle soit déclenchée. Et lorsqu’elle sera déclenchée, vous devrez la remplir de radicalité et la généraliser.
Nous convergeons pour nous soulever. Nous nous soulevons pour converger. Demain à Rome, avec les luttes pour la justice climatique, pour le droit à la santé publique et au logement. Demain, la « tortue » se remet en mouvement. Pour ceux qui partent avec nous, rendez-vous à 7 h 30 devant GKN. Ponctuels, coopératifs, joyeux et alertes. Nous vous remercions d’avance : nous savons que vous êtes merveilleux.
Il existe aujourd’hui une forte concurrence entre différents points de vue : il y a ceux qui veulent réduire toute l’opposition sociale à un simple dualisme sur le green pass, ceux qui ne veulent pas d’opposition sociale, ceux qui veulent donner à l’opposition sociale une forme purement rituelle, et ceux qui, comme nous, n’en peuvent plus de toutes ces souffrances et se battront par tous les moyens parce que c’est le moment d’un changement historique. Et même si ce n’est pas le cas, si ce n’est finalement qu’un automne parmi tant d’autres, nous ferons en sorte de ne rien regretter, de ne rien avoir à nous reprocher.
Une atmosphère étrange règne par rapport à la manifestation de demain. Les vieux spectres des provocations et des tensions reviennent. Il faut donc garder l’œil ouvert et l’esprit clair. Mais, pour paraphraser une chanson : vous ne nous faites pas mal, nous avons appris à tomber.
10 novembre
Le temps presse. Faisons le point.
GKN Florence pourrait relancer sa production à tout moment et être vendue tout en garantissant la continuité de sa production. La liquidation et l’inactivité du site de Florence sont des choix, sans vision entrepreneuriale sur le long terme et socialement criminels, faits et imposés par l’entreprise GKN.
GKN n’a jamais annulé la procédure de liquidation et estime avoir effectué les démarches nécessaires à la réouverture de la procédure de licenciement. En ce qui nous concerne, GKN n’a répondu à aucune de nos questions sur les causes et les mécanismes réels du processus de délocalisation. Nous déciderons comment et quand exposer cela au moment opportun, auprès des institutions, privées ou publiques, et des journalistes, si nécessaire.
GKN a fait savoir qu’elle ne rouvrirait pas la procédure de licenciement en novembre. Des mots, toujours des mots. Et dans tous les cas, cela implique implicitement qu’ils se préparent à le faire en décembre. Ainsi, les 75 jours de la procédure tomberaient pendant les mois de décembre et janvier, période moins propice à la mobilisation.
Le temps gagné par la victoire judiciaire du recours à l’article 28 a été gâché. Il n’a pas été employé par le gouvernement à l’adoption d’une loi anti-délocalisation ou d’un décret d’urgence pour empêcher la nouvelle procédure de licenciement. La loi anti-délocalisation se trouve au Parlement. Elle peut être discutée, amendée, modifiée. C’est un fait. Si GKN rouvre la procédure de licenciement, nous promettons d’être en colère. Nous promettons d’être en colère et dans la rue. Florence, désolés pour le dérangement.
GKN se présente donc à la table de négociation avec un pistolet chargé. Et elle vient négocier l’avenir du site de production sans réelle capacité, ni peut-être même volonté, de donner un mandat de vente qui garantisse réellement la continuité de la production et de l’emploi. L’avenir de GKN Florence est entre les mains d’un fonds financier distant et arrogant, d’un directeur général arrivé en mars 2020 et d’un groupe d’avocats milanais qui ne savent même pas à quoi ressemble l’usine. Sans mesure du gouvernement, nous ne serons pas conviés à une négociation, mais à un piège. Un piège, car la signature de l’accord de licenciement et les promesses de repreneurs improbables seront comme des coups de matraque, d’abord pour nous faire chanter et ensuite pour nous conduire à une lente agonie.
Le mouvement de défense de GKN est un mouvement aux aspects multiples. C’est aussi et surtout un mouvement pour éviter que l’usine de Campi Bisenzio ne devienne un nouvel écomonstre de notre territoire. L’entreprise a entre autres évoqué la possible nomination d’un conseiller sérieusement convaincu que des incinérateurs de déchets devraient être construits à proximité de chaque usine automobile, et cela est en soi doublement inquiétant.
Ce que nous faisons n’est que dicté par les exigences directes du conflit. La nécessité d’un soulèvement et d’un changement radical n’en est que la conséquence. Faisons-la ensemble cette négociation. Envisageons toutes les hypothèses possibles. Pouvons- nous espérer un bon accord au niveau ministériel ? Bien sûr, nous essaierons de l’obtenir. Mais dans le passé, dans de nombreux cas, les mêmes multinationales ont violé des accords signés et sont revenues dessus. N’est-ce pas l’histoire de Whirlpool ? Peut-on alors compter sur les indemnités pour gagner du temps ? C’est peut-être une étape nécessaire. Mais l’histoire du pays n’est-elle pas pleine d’entreprises qui ont été mijotées à petit feu puis fermées à coup d’indemnités ? Pouvons-nous compter sur le conseiller désigné par l’entreprise et sur un potentiel acheteur privé ? L’entreprise n’a pas vraiment intérêt à laisser l’usine continuer sa production. Et l’histoire récente est pleine d’entreprises en fin de vie qui attendent un repreneur, soi-disant toujours au coin de la rue, mais qui n’arrive jamais. Nous ne voulons pas attendre. Nous demandons à être nationalisés et à reprendre le travail, avec des retombées socialement avantageuses et utiles. Mais même dans ce cas, il ne faut pas oublier les nationalisations honteuses de MPS, Ilva, Alitalia : des nationalisations pour rien ou pire, comme dans le cas d’Alitalia, une opération de chantage social.
Toutes les luttes comme la nôtre ont jusqu’à présent échoué. C’est pourquoi nous ne pouvons pas reproduire la normalité. C’est pourquoi nous ne soutenons pas seulement que notre nationalisation est nécessaire, mais aussi que celle-ci doit être faite avec l’assemblée permanente des travailleurs et en collaboration avec un véritable mouvement de soutien et de réseaux territoriaux, impliquant les universités, les associations environnementales et sociales.
Non seulement nous pourrions relancer la production à tout moment, mais nous sommes en mesure de proposer un plan public, global, de construction d’un pôle de formation et de modernisation de l’industrie 4.0, avec un brevet public déposé par l’université.
Nous pensons à un plan public, global, de construction d’un pôle de mobilité durable. Ce plan concernerait les usines désaffectées de Stellantis, comme les aciéries, GKN, l’ex-Irisbus, Bekaert. Il serait fondé sur la recherche et les brevets publics de voitures à émissions réellement nulles. Il ferait appel à des technologies alternatives à la voiture électrique dont la limite principale est qu’elle conduit potentiellement à un extractivisme débridé. Il s’agirait de créer dans les universités des groupes de recherche pour la réindustrialisation publique, d’encourager la création de brevets publics, de transformer sur-le-champ GKN en laboratoire social et productif intégré à ce plan.
- Nous sommes en train de parler ici de science-fiction, si l’on considère notre rapport de force actuel dans la société. Mais cela semblait aussi être de la science-fiction qu’une usine isolée se soulève avec le soutien de tout un territoire. Ce n’est pourtant pas de la science-fiction. Ici, il s’agit de se sauver, de respirer, de survivre et de changer les choses. Et de les changer pour pouvoir survivre. Et d’avoir conscience que le temps nous est compté. Le temps nous est compté pour notre lutte, pour sauver une société qui s’effondre dangereusement sur elle-même, pour nos camarades de Whirlpool, d’Alitalia, et pour toutes les luttes en cours, pour tous les précaires de ce pays. Le temps nous est compté pour agir face à la destruction de l’environnement.
Nous sommes condamnés à essayer de changer les choses. Et à le faire tous unis, en faisant converger toutes les luttes en cours. Et l’instrument de ce changement c’est la grève générale et généralisée. Mais nous reviendrons bientôt sur ce point. Restez soudés. Restez bien accrochés les uns aux autres dans cette bataille. Ne lâchez pas et nous, nous continuerons avec vous à respirer, à soupirer et à changer les choses. Tenez-vous prêts samedi 20 au matin.
Quelques réflexions sur les prochaines dates :
Nous le répétons : pour sauver GKN, il est nécessaire de changer les rapports de force dans ce pays. Nous ne le disons pas à la légère ou comme un slogan. Nous le disons à partir de l’analyse de chaque lutte actuelle et passée, de la situation du secteur de l’automobile en Italie, de l’impuissance et de la complicité du ministère et du gouvernement face à l’arrogance des multinationales, des fonds financiers et de la Confindustria. Chaque fois que nous essayons de proposer une solution pour sauver GKN, nous nous heurtons aux problèmes structurels du pays et du système. Nous sommes obligés d’être radicaux parce que les processus qui ont permis la fermeture de notre usine sont radicaux et profondément enracinés.
C’est pourquoi l’expansion de la lutte a été depuis le début une exigence vitale pour GKN. Mais dès que la lutte s’étend, chacun est confronté à ses propres problèmes, à ses propres revendications. Et en contribuant à changer les rapports de force, il finit aussi par changer les choses en sa faveur. Celui qui rejoint cette lutte le fait aussi pour lui.
Nous pensons tout d’abord aux situations dites de crise, passées, présentes et futures. Il est absurde de différencier les aciéries, Whirlpool, Fedex, Alitalia, Air Italy, les travailleurs de Stellantis et de l’industrie automobile, etc. Cela n’a aucun sens d’un point de vue critique. Cela n’a pas non plus de sens d’un point de vue tactique, la seule alternative restante étant alors la lutte individuelle qui mène à l’épuisement ou au chantage. Cela n’a pas de sens d’un point de vue programmatique, car il faut revendiquer un changement total des normes et une réelle intervention publique qui reconfigure des filières productives entières, de manière socialement avantageuse et écologiquement durable.
Nous n’avons cependant jamais prôné une simple unification des luttes ou des entreprises en crise. Il y a des millions de travailleuses et travailleurs qui sont en situation de crise sans même avoir le droit d’être considérés comme tels : précaires, chômeurs, contrats à durée indéterminée, mais avec des salaires de misère, contractuels, stagiaires, entrepreneurs, petits commerçants, travailleurs du tourisme, de la restauration, du spectacle, du journalisme et de l’information, ceux qui font un travail à la pièce déguisé, économie souterraine. Ces travailleuses et travailleurs ne font pas les gros titres dans les journaux, ils ne sont pas invités à des tables de négociation avec le MISE. Les travailleuses et travailleurs des secteurs de la santé, de l’éducation et de la fonction publique sont montrés du doigt comme des héros et des privilégiés tous les deux jours, mais en réalité, leurs conditions de travail se détériorent toujours plus et sont attaquées depuis des années.
Et il n’y a pas que le thème de la « crise ». Il y a aussi le thème de la reprise, qui repose entièrement sur la précarité. Si nous prenons des indicateurs tels que l’évolution des salaires et la répartition des richesses et du bien-être, l’évolution de la société de ces dernières années se caractérise par une tendance à la détérioration de nos conditions de vie. Et ceux qui se sentent épargnés, peut- être au sein d’une entreprise prospère où les primes de production et les aides sociales sont généreuses, se trompent. Et leur réveil sera dur et brutal.
Un changement global ne peut venir que d’un mouvement global. Et un mouvement global ne peut venir que de la convergence des différentes luttes actuelles et en appelant aux soulèvements. C’est pourquoi nous soutenons l’unité du monde du travail avec toutes les luttes sociales, à commencer par le mouvement pour la justice climatique. Car le travail se retrouve piétiné et oppressé par le modèle actuel du développement.
- Nous avons organisé des manifestations avec des milliers de participants. Le territoire s’est soulevé pour nous défendre. Nous nous sommes soulevés pour défendre le territoire. La collectivité a défendu cette usine, cette usine défend la collectivité. Il est nécessaire de continuer. Mais il est insuffisant de continuer seulement de cette manière. Nous avons le devoir de le dire : la grève générale et généralisée sera l’instrument principal pour étendre la lutte. C’est une exigence vitale pour GKN. Mais elle est aussi vitale pour toutes les autres luttes.
Nous sommes conscients qu’une grève générale et généralisée est impossible sans préparation. Le pays connaît une grande effervescence, mais il ne s’agit pas encore d’une lutte généralisée. Et surtout, on manque de clarté sur les possibilités et les objectifs d’une mobilisation générale. Une date de lutte, quelle qu’elle soit, doit aussi penser à sa continuité, à son efficacité et à sa crédibilité. Mais la question de la préparation ne doit pas non plus devenir une excuse pour reporter éternellement la lutte à plus tard. Il faut bien lancer la machine. D’une certaine manière, elle est déjà lancée. C’est pourquoi nous répétons encore une fois : si ce n’est pas maintenant, alors quand ?
Et personne ne t’offrira une véritable grève générale et généralisée, sans ta participation sociale et de base. Soyons clairs : la CGIL a montré qu’elle pouvait organiser une manifestation de centaines de milliers de personnes en quelques minutes. Si cette force était utilisée avec conviction, elle serait peut-être encore insuffisante, mais elle constituerait une base importante. Au contraire, la mobilisation du 16 octobre risque d’être une gifle pour des milliers de travailleuses et travailleurs si elle ne permet pas une grande mobilisation sur la question des retraites, des délocalisations, des entreprises en crise, des morts au travail, etc. En ritualisant l’antifascisme, on lui fait du tort, au lieu de le faire vivre dans la force sociale.
La FIOM a demandé un forfait de huit heures de grève. L’idéal serait, après les assemblées organisationnelles, de les utiliser pour une date unique de grève nationale de la métallurgie que les autres mobilisations pourraient rejoindre. Nous lançons un appel dans ce sens, pour notre bien et celui de tous.
Mais en même temps, nous n’attendons rien et personne. Et nous n’attendons rien de personne. Lorsque nous parlons de grève générale et généralisée, nous ne pensons pas à la date d’un calendrier, mais à un processus. Un processus qui est lié aux luttes en cours et qui est également une invitation à se responsabiliser et à se soulever. Lorsque vous vous demandez « qui appelle à la grève générale ? », vous posez la question de manière partielle. Et elle est donc partiellement fausse. La question devrait plutôt être : qui fait vivre la grève générale, qui la généralise, qui va la continuer et la renforcer ? Et la réponse est que vous seuls pouvez le faire, que nous seuls pouvons le faire. L’« automne chaud » n’était pas une série d’appels lancés d’en haut, mais un processus de réveil et d’intersection des luttes qui a radicalement changé l’organisation syndicale, et par la suite le pays. Et les quelques droits qui subsistent ont été gagnés dans le sillage de ce changement. Un modèle d’organisation conçu pour gérer le système existant est inadapté pour promouvoir le changement.
Le temps de la colère n’est pas révolu, donc. Il a seulement évolué. C’est pourquoi GKN descendra dans la rue et convergera avec la grève étudiante : le 20 au matin, à 9 h 30, sur la place San Marco. Cette date s’inscrit dans la continuité de la journée de lutte pour l’éducation publique du 19. Mais à Florence, le cortège étudiant défilera le 20 au matin, pour permettre au plus grand nombre de converger. C’est pourquoi nous invitons tout le monde à faire comme nous : converger avec la grève étudiante. Nous appelons les mouvements pour l’environnement, pour la santé, le mouvement féministe, pour le logement, les entreprises en crise, les organisations politiques et syndicales à faire de même.